Ils avaient souvent entendu des bruits sourds
venant d’en haut. Ils savaient que quelqu’un
pouvait vivre là. Il fut décidé que cette idée
devait être investiguée. Je vais décrire cela
brièvement car raconter toute l’histoire
prendrait trop de temps.
Doués de sagesse, ils créèrent des oiseaux. Je
vais en nommer trois. Deux sont connus pour leur
force et leur rapidité, le kisa (l’aigle) et le
pavowkaya (l’hirondelle). Le troisième était un
moochnee (l’oiseau moqueur). Son vol est
maladroit mais il est connu pour être sage. Ils
furent chacun créé à un moment différent par des
chants magiques, de la fumée de tabac et des
prières, et par de la poussière et de la salive
recouvertes d’un capuchon blanc (l’ova). Chacun
fut respectueusement accueilli et reçut les
instructions de sa mission, s’il réussissait. Les
deux premiers ne réussirent pas à atteindre la
partie supérieure du ciel mais le troisième,
moochnee, passa par une ouverture et se retrouva
dans ce monde.
Le nouveau monde était très joli. La terre était
verte et en pleine floraison. L’oiseau respecta
toutes les instructions. Son sens de la sagesse
le guida vers l’être qu’il était sensé chercher.
Quand il le trouva, il était midi car l’être,
Maasau’u, le Grand Esprit, était en train de
préparer son repas. Des épis de maïs se
trouvaient à côté du feu. L’oiseau descendit et
atterrit sur le toit de sa kisi (maison) et
annonça son arrivée.
Maasau’u ne fut pas surpris par le visiteur car
sa sagesse et son odorat l’avaient prévenu que
quelqu’un arrivait. Il l’accueillit
respectueusement et l’invita à s’asseoir. Leur
conversation fut brève : « Pourquoi es-tu ici ?
Serait-ce important ? » « Oui », répondit le
Moochnee, » J’ai été envoyé ici par les gens du
monde souterrain. Ils souhaitent venir dans ton
monde et vivre avec toi car leur façon de vivre
est corrompue. Avec ta permission, ils voudraient
venir ici avec toi et commencer une nouvelle vie.
C’est pour cela que je suis venu ». Maasau’u
répondit brusquement mais avec respect, « Ils
peuvent venir. »
L’oiseau retourna avec ce message vers le monde
souterrain. Pendant son absence, les Kikmongwi et
les leaders avaient continué de prier et
d’attendre son retour couronné de succès.
Lorsqu’il revint avec les bonnes nouvelles du
nouveau monde et la permission de Maasau’u, ils
furent remplis de joie.
Maintenant, la question était de savoir comment
ils allaient atteindre le sommet du monde. Ils se
remirent à fumer et à prier pour recevoir de
l’aide. Finalement, ils furent tous d’accord pour
planter un arbre qui grandirait et qui leur
servirait de sentier. Ils plantèrent une graine
de shalavee (épicéa), prièrent et chantèrent des
chants magiques. L’arbre grandit et grandit
jusqu’à atteindre le ciel mais ses branches
étaient si légères et si nombreuses qu’il courba
sous la pression de la terre qui se trouvait
au-dessus et il ne réussit pas à percer le ciel.
Ils plantèrent une nouvelle graine, cette fois
celle d’un lougu (pin). Il grandissait alors
qu’ils chantaient leurs chants magiques. Cet
arbre était solide et fort. « Sûrement que
celui-ci va arriver à passer », pensaient-ils.
Mais ce ne fut pas un succès car ses branches se
courbèrent également lorsqu’elles entrèrent en
contact avec l’objet solide. Ils plantèrent une
nouvelle graine. C’était cette fois celle d’un
pakave (roseau). Comme il se terminait en
pointe, il réussit à percer le ciel et à passer
dans le nouveau monde.
Pendant ce temps, tout ceci avait été gardé
secret. Seuls les gens convenables, vertueux et
avec-un-seul-coeur avaient été informés des plans
pour quitter le monde corrompu. Ils étaient
préparés à partir et dès qu’ils surent que la
tentative avait réussi, ils commencèrent à
grimper sur la plante, se reposant entre les
joints du roseau, et continuant ainsi leur route
vers l’ouverture.
Lorsqu’ils arrivèrent dans ce monde, tout était
beau et paisible. La terre était vierge et
n’avait pas été molestée. Ils étaient très
heureux. Ils chantèrent et dansèrent avec joie,
mais leur joie fut de courte durée car cette
nuit-là, la fille du chef mourut soudainement.
Tout le monde était triste et inquiet. Les gens
se regardaient de façon suspicieuse. Un sortilège
avait été jeté. Cela leur fit penser qu’une
sorcière ou qu’une personne à-deux-coeurs était
parmi eux.
Le Kikmongwi avait un grand pouvoir et il devait
l’utiliser pour calmer l’inquiétude de son
peuple. Il fit une petite boule de farine de maïs
qu’il lança au-dessus du groupe. Celui sur la
tête duquel la boule atterrirait serait le
coupable. Elle atterrit sur la tête d’une jeune
fille. Ils décidèrent rapidement de la jeter dans
l’ouverture qui conduisait au monde souterrain.
Ils devaient se débarrasser de la malveillance
car ils désiraient vivre en paix sur cette
nouvelle terre. Mais la sorcière implora leur
pitié, leur disant que durant le long voyage qui
les attendait, ils allaient devoir faire face à
de nombreux obstacles et dangers de toutes sortes
et qu’alors, ses services seraient bien utiles
car elle avait le pouvoir de combattre le mal.
Elle invita le Kikmongwi à regarder dans le monde
souterrain. Il regarda et vit son enfant en train
de jouer gaiement avec d’autres enfants, dans le
monde souterrain où nous retournerons tous après
notre mort. Elle fut épargnée mais il la laissèrent là, seule, espérant peut-être qu’elle
périra d’une cause inconnue.
Raconté par Dan Katchongva, du Sun Clan,
qui vécut de 1865 à 1972 Traduit en anglais par
Danaqyumptewa Edité par Thomas Francis Traduit en
français par Didier Wolfs