Antonin Artaud

Antoine Marie Joseph Artaud, appelé: Artaud le Mômo est né le 04 septembre 1896 à Marseille.

Poète, écrivain, dramaturge, son oeuvre est inclassable, dérangeante pour beaucoup; il est mort le 04 mars 1948 à Ivry.

Qu’est ce que vous foutel là monsieur Artaud?

L’oeuvre d’Artaud vise un absolu pour lequel il brûla sa vie et sa raison. Ses réalisations théâtrales sont modestes au regard de l’influence qu’il a exercée sur les générations suivantes. Poète, dessinateur, acteur de cinéma et homme de théâtre, Antonin Artaud a trouvé dans ces multiples activités à la fois le moyen de gagner sa vie (il joue dans vingt-deux films dont Napoléon d’Abel Gance et Jeanne d’Arc de Dreyer) et d’exprimer la souffrance et la quête mystique qui l’habitait.

Lié, un temps au mouvement surréaliste, il fonde avec Roger Vitrac le théâtre Alfred Jarry. En 1927, lors de la première du Songe de Strindberg. Le spectacle ayant été réalisé pour partie grâce à des fonds octroyés par l’Ambassade de Suède, la représentation fut interrompue par une bataille mémorable opposant Artaud et Vitrac aux surréalistes rangés derrière André Breton qui les accusaient de s’être vendus aux puissants, En 1935, Artaud monte Les Cenci, une pièce qu’il a composée à partir d’une nouvelle de Stendhal.

Mais c’est Le théâtre et son double, ouvrage dans lequel il appelle à débarrasser la scène des conventions que les siècles lui ont imprimées et à renouer avec le rituel et la transe, qu’il forge le concept de théâtre de la cruauté

L’auteur attend de l’action scénique qu’elle produise un choc d’ordre traumatique, donnant au spectateur accès à une réalité supérieure, ce en quoi Artaud rejoignait, de manière toute personnelle, l’idéal surréaliste.

Antonin Artaud, photo de Man Ray

Amitiès: Claude Sarfati

Tous les matins du monde (Hommage à Jean-Pierre Marielle)




  • Monsieur, puis-je vous demander une dernière leçon ? (Marin Marais)
    Monsieur, puis-je tenter une première leçon ? (Mr De Sainte Colombe)

Je veux parler…

La musique est simplement là pour parler de ce dont la parole ne peut parler…

En ce sens, elle n’est pas tout à fait humaine…

Alors, vous avez découvert qu’elle n’est pas pour le roi ?

  • J’ai découvert qu’elle était pour dieu.
  • Eh bien vous vous êtes trompé car dieu parle…
  • Pour l’oreille ?
  • Ce dont je ne peux parler n’est pas pour l’oreille…
  • Pour l’or, la gloire, le silence…
  • Le silence n’est que le contraire du langage…
  • Les musiciens rivaux ?
  • Non…
  • L’amour…
  • Non
  • Le regret de l’amour…
  • Non
  • L’abandon…
  • Non et non
  • Pour une gaufrette donnée à l’invisible ?
  • Non plus, mais qu’est-ce donc qu’une gaufrette ?

      Ça se voit, ça a du goût, ça se mange, ce n’est rien…

  • Je ne sais pas monsieur, je ne sais plus… Je crois qu’il faut laisser un verre aux morts…
  • Vous aussi brulez-vous ?
  • Un petit abreuvoir pour ce que le langage a déserté… Pour l’ombre des enfants…

Pour adoucir les coups de marteaux des cordonniers…

Pour les états qui précédent l’enfance, quand on était sans souffle sans lumière…

  • Monsieur, tout à l’heure vous avez entendu que je soupirais…

 Je vais mourir sous peu et mon art avec moi…

Seules mes poules et mes oies me regretteront…

Je vais vous confier un ou deux arias capables de réveiller les morts…

Allons, il faut à boire, il faut aussi que nous allions chercher la viole de feu ma fille Madeleine

Je vais vous faire entendre Le tombeau des regrets…

Je n’ai encore trouvé, parmi mes élèves aucune oreille pour les entendre…Vous m’accompagnerez !

https://www.youtube.com/watch?v=GLGb385T6WU

Dialogue entre Mr de Sainte Colombe et Marin Marais extrait du film : Tous les matins du monde réalisé par Alain Corneau en 1991. Il est tiré d’un roman éponyme écrit par Pascal Guignard, qui retrace la vie du compositeur français du XVll° siècle Marin Marais, et ses relations avec un autre compositeur contemporain, Monsieur de Sainte Colombe.

Jean-Pierre Marielle partit rejoindre ses amis Philippe Noiret et Jean Rochefort

Amitiés, Claude Sarfati

Henri Michaux

Extrait de L’espace du dedans, collection NRF, Gallimard.

Henri Michaux, né à Namur (Belgique) le 24.05.1899, mort à Paris le 19.10.1984.

Poéte, écrivain, peintre.

Vers la sérénité

Celui qui n’accepte pas ce monde n’y bâtit pas de maison.

S’il a froid, c’est sans avoir froid. Il a chaud sans chaleur.

S’il abat des bouleaux, c’est comme s’il n’abattait rien ;

mais les bouleaux sont là, par terre et il reçoit l’argent convenu,

ou bien il ne reçoit que des coups.

Il reçoit les coups comme un don sans signification,

et il repart sans s’étonner.

Il boit de l’eau sans avoir soif,

il s’enfonce dans le roc sans se trouver mal.

La jambe cassée, sous un camion, il garde son air habituel et songe à la paix,

à la paix si difficile à obtenir, si difficile à garder, à la paix.

Sans être jamais sorti, le monde lui est familier.

Il connaît bien la mer. La mer est constamment sous lui,

une mer sans eau, mais non pas sans vagues, mais non pas sans étendue.

Il connaît bien les rivières. Elles le traversent constamment,

sans eau mais non pas sans largeur, mais non pas sans torrents soudains.

Des ouragans sans air font rage en lui.

L’immobilité de la terre est aussi la sienne.

Des routes, des véhicules, des troupeaux sans fin le parcourent,

et un grand arbre sans cellulose mais bien ferme mûrit en lui amer, amer souvent, doux rarement.

Ainsi à l’écart, toujours seul au rendez-vous, sans jamais retenir une main dans ses mains,

il songe, le hameçon au coeur, à la paix, à la damnée paix lancinante,

la sienne, et à la paix qu’on dit être par-dessus cette paix.

La nuit remue (1934) L’espace du dedans

Dessin de l’auteur.