De cette extraordinaire floraison de grands sages hindous qui apparurent vers le premier quart de notre siècle et dont l’enseignement se répand aujourd’hui de part le monde, le plus traditionnel est sans contredi Ramana Maharshi (1879-1950).
Après de longues années d’un rigoureux ascétisme solitaire, il était parvenu sur le plan de conscience de l’unité.
Pour lui, l’identité, dans un éternel présent, entre le moi et le non-moi, entre le Divin supracosmique et le divin dans le coeur de l’homme, était une vérité constante.
Dans sa bonté envers tous ceux qui l’approchaient- et en qui il ne voyait que le Soi qui était aussi en lui, identique-
Il conseillait la recherche inlassable de cette vérité, en ramenant tous les problèmes et toutes les alternatives à la question fondamentale: Qui suis-je?
Le Maharshi n’écrivait presque jamais, mais de pieux disciples ont parfois recueilli ses entretiens.
Pierre Faucheux.
L’enseignement de Ramana Maharshi, préface de Jean Herbert, 1972 Albin Michel
Michel Piccoli est né en 1925 à Paris. Acteur fétiche de Claude Sautet, il a tourné avec les plus grands, de Jean Renoir à Agnès Varda en passant par Alfred Hitchcock et Costa-Gavras. Il est décédé à l’âge de 94 ans. A l’âge de dix ans, lors d’un spectacle d’école, il sait que le théâtre sera sa vocation. Neuf années plus tard, il suivra entre autres les cours de René Simon et débutera sa carrière sur scène avec la compagnie Renaud-Barrault ainsi qu’au Théâtre de Babylone. Au cinéma, Michel Piccoli se fait connaître dans « Le Doulos » de Jean-Pierre Melville en 1962 et l’année suivante son rôle aux côtés de Brigitte Bardot dans « Le Mépris » de Jean-Luc Godard lui assure la célébrité et l’impose dans un emploi de séducteur. Tournant avec les plus grands réalisateurs français ou européens, Michel Piccoli aime à rester fidèle à certains d’entre eux comme Luis Buñuel (dans « Le journal d’une femme de chambre » en 1964 ou « Belle de jour » en 1967) ou Claude Sautet dans « Les Choses de la vie » (1970) ou encore Marco Ferreri (dans « La grande bouffe » en 1973). En 2015, il publie son autobiographie J’ai vécu dans mes rêves (Ed. Grasset). Il meurt le 12 mai 2020.
Le « dernier géant », un « monstre sacré » :
les qualificatifs qui entourent la mort de Michel Piccoli ne lui rendent pas
vraiment hommage. Ils tiennent du « prêt-à-porter » pour les grands hommes, du
registre masculin stéréotypé. Or Piccoli c’est précisément l’homme qui a
dynamité ces images.
Mais cette carrière aussi vertigineuse soit-elle n’est ni celle d’un géant ni celle d’un monstre, c’est celle d’un homme qui a offert la plus incroyable des interfaces. Le plus large spectre de reconnaissance qui soit. Par-delà le « male gaze », ce fameux regard masculin, Piccoli a inventé un espace de projection entre les genres. Voilà ma théorie.
Le mâle-entendu
Bien sûr les infinies nuances de virilité qu’il a incarné
à l’écran mettent d’abord sur la piste de ce mâle-entendu, mais comme le disait
Catherine Deneuve sa partenaire dans « Belle de jour » :
c’est un homme tellement homme que devant la caméra de Luis Buñuel il lui a
abandonné sa part féminine. Il y a en effet une grande féminité et une grande
masculinité chez Piccoli, ce qui est tout simplement caractéristique de l’âme humaine,
dont il nous a laissé contempler en lui les infinies profondeurs. « Nous
sommes des loueurs de miroirs que nous offrons au public afin que ce dernier se
contemple » rappelait-il pour définir le métier d’acteur.
En nuisette noire, renversé dans un lit en plein crise
d’aérophagie, tandis que ses camarades lui donnent la becquée, il est dans « La
grande bouffe » de Marco Ferreri, l’homme, la femme et
l’enfant. Michel Piccoli était d’un temps « où les messieurs qui n’en
avaient pas fini avec leur enfance donnaient le change » a esquissé
l’auteur de bandes dessinées Blutch dans son très cinéphile « Pour en
finir avec le cinéma ».
Mais c’est plus que cela. Toujours à la jonction des regards,
Piccoli est aussi l’homme qui regarde la femme qui regarde l’homme, et ce en
même temps, à la même seconde. Que ce soit dans « Le Mépris » de Godard
avec Brigitte Bardot (en haut de la villa Malaparte comme dans la salle de
bain), ou bien encore dans « Les choses de la vie »
de Claude Sautet avec Romy Schneider.
Une femme de dos, les épaules nues tape à la machine, un homme dans un peigneur pelé, d’un orange disgracieux, l’observe silencieusement en fumant une cigarette. Dans ces yeux : une curiosité bienveillante qui oscille entre la contemplation admirative et le désir… Elle se retourne « qu’est-ce que tu fais ?- je te regarde ». Et dans ce regard qui regarde tout le monde peut se reconnaître.
Il y a peut-être 150
millions de galaxies
contenant chacune 120, 150 millions d’étoiles…
À des centaines de milliers d’années lumières…
Il y a des centaines d’autres galaxies
contenant encore des milliards d’étoiles…
Poussière dans un Sahara d’étoiles…
malgré les grands yeux du néant
c’est pour mieux nous manger enfant
et les silences et les boucans…
faut vivre
bien qu’aveugles sur fond de nuit
entre les gouffres infinis
des milliards d’étoiles qui rient…
faut vivre…
malgré qu’on soit pas toujours beau et que l’on ait plus ses seize ans et sur l’espoir un chèque en blanc faut vivre…
malgré le cœur qui perd le nord au vent d’amour qui souffle encore et qui parfois encore nous grise faut vivre…
malgré qu’on ait pas de génie n’est pas Rimbaud qui peu pardi et qu’on se cherche un alibi malgré tous nos morts en goguette qui errent dans les rues de nos têtes faut vivre…
malgré qu’on soit brave
et salaud
qu’on est des complexes à gogo
et qu’on les aime c’est ça le pire
faut vivre…
malgré l’idéal du jeune temps
qui c’est usé au nerf du temps
et par d’autre repris en chantant
faut vivre…
malgré qu’en s’tournant vers l’passé
on est effrayé de s’avouer
qu’on a tout de même un peu changer
faut vivre…
malgré qu’on soit du même voyage
qu’on vive en fou, qu’on vive en sage
tout finira dans un naufrage
faut vivre…
malgré qu’au ciel de nos poitrines
en nous sentinelle endormie
dans un bruit d’usine gémit
le cœur aveugle qui funambule
sur le fil du présent qui fuit
faut vivre…
malgré qu’en nous un enfant mort
parfois si peu sourit encore
comme un vieux rêve qui agonise
faut vivre…
malgré qu’on soit dans l’engrenage
des notaires et des héritages
ou le cœur s’écœure et s’enlise
faut vivre…
malgré qu’on fasse de
l’humour noir
sur l’amour qui nous en fera voir
jusqu’à ce qu’il nous dise au revoir
faut vivre…
malgré qu’à tous les horizons
comme un point d’interrogation
la mort nous regarde d’un œil ivre
faut vivre…
malgré tous nos serments d’amour
tous nos mensonges jour après jour
et bien que l’on ait qu’une vie
une seule pour l’éternité
malgré qu’on la sache ratée….
Il existe un enregistrement hommage à Mouloudji paru le 14 juin 2014 à l’initiative de ses enfants: Anabelle et Grégory, en voici le lien: Hommage à Mouloudji
L’oeuvre d’Artaud vise un absolu pour lequel il brûla sa vie et sa raison. Ses réalisations théâtrales sont modestes au regard de l’influence qu’il a exercée sur les générations suivantes. Poète, dessinateur, acteur de cinéma et homme de théâtre, Antonin Artaud a trouvé dans ces multiples activités à la fois le moyen de gagner sa vie (il joue dans vingt-deux films dont Napoléon d’Abel Gance et Jeanne d’Arc de Dreyer) et d’exprimer la souffrance et la quête mystique qui l’habitait.
Lié, un temps au mouvement surréaliste, il fonde avec Roger Vitrac le théâtre Alfred Jarry. En 1927, lors de la première du Songe de Strindberg. Le spectacle ayant été réalisé pour partie grâce à des fonds octroyés par l’Ambassade de Suède, la représentation fut interrompue par une bataille mémorable opposant Artaud et Vitrac aux surréalistes rangés derrière André Breton qui les accusaient de s’être vendus aux puissants, En 1935, Artaud monte Les Cenci, une pièce qu’il a composée à partir d’une nouvelle de Stendhal.
Mais c’est Le théâtre et son double, ouvrage dans lequel il appelle à débarrasser la scène des conventions que les siècles lui ont imprimées et à renouer avec le rituel et la transe, qu’il forge le concept de théâtre de la cruauté
L’auteur attend de l’action scénique qu’elle produise un choc d’ordre traumatique, donnant au spectateur accès à une réalité supérieure, ce en quoi Artaud rejoignait, de manière toute personnelle, l’idéal surréaliste.