J’ai participé pendant près de vingt ans aux travaux d’un groupe de recherches empiriques concernant d’abord les échanges de contenus de conscience qu’on appelle « télépathie« , puis, à partir de la fin des années soixante-dix, ce que nous définissons plus généralement comme « intuition« , la télépathie étant considérée comme un cas particulier de cette dernière.
Ce groupe a été créé par Henri Marcotte qui travailla d’abord à l’institut Métapsychique de Paris, participant aux recherches du Docteur Warcollier sur la transmission de dessins par télépathie. Henri avait une expérience personnelle de cette faculté et cherchait à montrer qu’elle était éducable. Il recruta, au début des années 60, un certain nombre de personnes qui voulaient bien participer à des expériences. Ces activités se poursuivirent jusqu’au milieu des années 80 où elles furent interrompues. Henri ayant dû, pour des raisons de santé, cesser de les diriger. Sa présence dans le groupe était nécessaire pour la continuation du travail, car il possédait plus qu’aucun de nous l’imagination intuitive qui permettait de le poursuivre et de le renouveler. Henri n’a écrit qu’un seul livre « La Télesthésie« , depuis longtemps épuisé, préférant à la théorie l’expérimentation vivante et les applications pratiques de nos découvertes.
Ces années ont permis de comprendre comment, et à quels niveaux, fonctionne l’échange télépathique. Une méthode d’entraînement fut mise au point, puis communiquée à un assez grand nombre de personnes par des cours et des séminaires. Dans la dernière décennie, les recherches du groupe s’étaient orientées vers l’intuition, considérée comme la base universelle dont la faculté d’échange télépathique n’était qu’un aspect. Aujourd’hui, ce groupe n’existe plus, mais il a donné naissance à de nombreuses « marcottes », entre autres dans les domaines de la psychiatrie et de la recherche psychologique. (P.M: Une marcotte est un surgeon enraciné qui sert à multiplier les plantes).
Nous avions inventé, puis diffusé, un certain nombre de techniques empiriques. Elles nous ont permis de repérer assez précisément certaines constantes du domaine intuitif dont la télépathie fait partie. Pour la résumer, disons d’abord que l’appellation « transmission de pensée » par laquelle on désigne habituellement cette dernière est fausse. L’échange en question se manifeste au niveau des sensations internes du corps. L’imagination sensorielle dont j’ai parlé plus haut joue un rôle important dans la prise de conscience. Les conventions sont toujours déterminantes. On ne croit pas que ce soit possible, donc ça ne l’est pas. Mais ces conventions préalables agissent aussi en sens inverse, de sorte qu’elles peuvent se transformer en de véritables outils expérimentaux.
Ces conventions étant de nature collective, il est évident que celles d’un groupe particulier agiront sur l’efficacité de ses expériences. On peut donc imaginer que des techniques très différentes de celles du groupe Marcotte puisse également réussir. Il faut ajouter, à ce sujet, que nos conventions excluaient résolument toute forme de crainte superstitieuse, le principe étant que l’on ne court pas de risques à exercer consciemment une faculté qui agit de toute façon chez tout le monde aux niveaux inconscients. Nous baignons continuellement dans ce milieu « interpsychique ». Le seul danger véritable de l’utilisation consciente intervient lorsqu’on tente de s’en servir pour exercer un pouvoir sur autrui. Non pas que ce soit impossible, mais une telle tentative indique qu’on n’a pas compris la nature de ce qu’on manipule. C’est un domaine où la fusion de soi-même avec l’autre est très prononcée, où l’on ne peut pas agir sur quelqu’un sans « être agi » en retour.
Enfin, l’introspection à deux que nous pratiquions dans nos expériences ouvrait parfois l’accès à des dimensions plus profondes, difficiles à décrire.
Editions: R2N IMPRESSION
Dessin: Jean Cocteau, Parapsychologie (1930)
Amitiés
Claude Sarfati