Chapitre XXV. La cité des saules

Le symbolisme de Tien-ti-houei a un caractère primordial.

Dabs l’initiation à la Tien-ti-houei, le néophyte, après être passé par différentes étapes préliminaires, dont la dernière est désignée comme le «Cercle du Ciel et de la Terre» (Tien-ti-kiuen), arrive finalement à la «Cité des Saules» (Mou-yang-tcheng), qui est aussi appelée la «Maison de la Grande Paix» (Tai-ping-chouang).

Le saule est, en Chine, symbole d’immortalité. Il équivaut à l’acacia dans la Maçonnerie ou au rameau d’or dans les mystères antiques.

…celui qui y est parvenu échappe par là même au mouvement de la «roue cosmique» et aux vicissitudes du yin et du yang, donc à l’alternance des vies et des morts qui en est la conséquence, de sorte qu’il peut être dit véritablement «immortel»; et, suivant la seconde signification, il y a là une allusion assez explicite à la situation «extra-cosmique» du «faîte du Ciel».“ (p. 203)

La Grande Ourse (sapta-riksha) est regardée symboliquement comme la demeure des sept Rishis, ce qui en fait bien un équivalent du «séjour des Immortels».

Ton arton ton epiousion (du texte grec de Pater) ne signifie nullement ‘le pain quotidien“, comme on a l’habitude de la traduire, mais bien littéralement «le pain supraessentiel», ou «supracéleste» si l’on entend le Ciel au sens extrême-oriental, c’est-à-dire procédant du Principe même et donnant par conséquent à l’homme le moyen de se mettre en communication avec celui-ci.

Récapitulation de toute la Maçonnerie ou description et explication de l’Hiéroglyphe universel du Maître des Maîtres, ouvrage anonyme attribué à Delaulnaye.

La lettre hébraïque iod, première du Tétragramme, représente le Principe, de sorte qu’elle est regardée comme constituant à elle-seule un homme divin. Sa valeur numérique est 10. La lettre I de l’alphabet latin est aussi un symbole de l’Unité.

qu’il s’agisse du iod hébraïque ou du i chinois, ce «premier nom de Dieu», qui était aussi, selon toute vraisemblance, son nom secret chez les Fedeli d’Amore, n’est pas autre chose, en définitive, que l’expression même de l’Unité principielle.“ (p. 208)

René Guénon,  »La grande triade » (extraits)

Chapitre XXIV. Le Triratna

Triratna hindou (le triple joyau) ‘ Buddha, Dharma, Sangha.

Sangha (hindou) ‘ assemblée (ou église ‘ selon le sens étymologique). Sangha est la communauté bouddhique, mais aussi l’Humanité même. Elle occupe une position centrale. Tout est envisagé par rapport à elle.

Les Arhats ont atteint le degré de l’ homme véritable.

Les Bodhisattwas correspond au degré de l’ homme transcendant.

Buddha est l’élément transcendant, à travers lequel se manifeste l’influence du Ciel, et qui, par suite, incarne cette influence.

Dharma est principialement la loi, mais le mot a en sanscrit des sens multiples, qui rendent une définition générale impossible. Sa racine, dhri, signifie porter, supporter, soutenir, maintenir. Il s’agit donc d’un principe de conservation, de stabilité (qui se rapport au monde substantiel). Il comprend aussi une idée de destin, de nécessité ou de contrainte. Son principal symbole est la roue.

Pratyêka-Buddha, qui est parvenu au terme de la réalisation totale, n’a aucun rapport avec le Dharma.

Buddha se situe du côté des influences célestes, tout comme Dharma est du côté des influences terrestres.

René Guénon, La grande triade (extraits)

Chapitre XXIII. La roue cosmique

Dans Absconditorum Clavis de Guillaume Postel on trouve le ternaire Deus, Homo, Rota. Le troisième terme est la roue cosmique, symbole du monde manifesté. Les Rosicruciens l’appellaient Rota Mundi.

On peut donc dire que, en général, ce symbole représente la «Nature» prise, suivant ce que nous avons dit, dans son sens le plus étendu; mais il est en outre susceptible de diverses significations plus précises, parmi lesquelles nous envisagerons seulement ici celles qui ont un rapport direct avec le sujet de notre étude.“ (p. 187)

La roue est assimilable au cercle, dont le centre est le Principe et la circonférence représente la manifestation.

En astrologie, c’est le signe du Soleil. En alchimie, c’est le signe de l’or. En numérologie correspond au dénaire (10). Le centre est unité et la circonférence multiplicité.

Les formes de roue qu’on rencontre le plus habituellement sont les roues à six et huit rayons, et aussi à douze et seize, nombres doubles de ceux-là. La plus simple est la roue partagée en quatre.

Il existe dans le symbole de la roue un ternaire constitué par le centre, le rayon et la circonférence. Il correspond respectivement au Ciel, à l’Homme et à la Terre.

voir: Louis-Claude de Saint-Martin, Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l’Homme et l’Univers.

(…)On doit donc se représenter l’homme, assimilé au rayon de la roue, comme ayant les pieds sur la circonférence et la tête touchant le centre; et en effet, dans le « microcosme », on peut dire que sous tous les rapports, les pieds sont en correspondance avec la terre et la tête avec le ciel.

C’est pour affirmer encore davantage cette correspondance, déjà marquée par la forme même des parties du corps aussi bien que par leur situation respective, que les anciens Confucianistes portaient un bonnet rond et des souliers carrés…

René Guénon, La grande triade (extraits)

Chapitre XXII. Le triple temps

Il existe un triple espace: le haut, le bas et au milieu un niveau de référence qui correspond à l’état humain.

Les trois gunas de la tradition hindoue correspondent respectivement: sattwa au Ciel, rajas à l’Homme et tamas à la Terre.

Si le plan médian est regardé comme un plan diamétral d’une sphère ( qui doit d’ailleurs être considérée comme de rayon indéfini, puisqu’elle comprend la totalité de l’espace), les deux hémisphères supérieur et inférieur sont, suivant un autre symbolisme dont nous avons déjà parlé, les deux moitiés de l’oeuf du Monde, qui, après leur séparation, réalisé par la détermination effective du plan médian, deviennent respectivement le Ciel et la Terre, entendus ici dans leur acception la plus générale; au centre du plan médian lui-même se situe Hiranyagarbha, qui apparaît ainsi dans le Cosmos comme l’ Avatâra éternel, et qui est par là même identique à l’ Homme Universel.“ (p. 180)

Il existe un triple temps, nommé dans la tradition hindoue trikâla: passé, présent et avenir (modalités temporelles). La représentation rectiligne du temps est inexacte, parce que le temps est cyclique.

(…) De même que, dans la tradition chinoise, l’Empereur, en se plaçant au point central du Ming-tang, détermine le milieu du cycle annuel; ainsi le milieu du temps est proprement, si l’on peut s’exprimer ainsi, le lien temporel de l’ homme véritable, et, pour lui, ce point est vraiment toujours le présent. (p. 182)

Le présent appartient à l’Homme, le passé au Destin (d’où son caractère de nécessité) et l’avenir à la Providence (d’où son caractère libre).

Il est que ce n’est là encore, en réalité, qu’une question de perspective, et que, pour un être qui est en dehors de la condition temporelle, il n’y a plus ni passé, ni avenir, ni par conséquent aucune différence entre eux, tout lui apparaissant en parfaite simultanéité …(p. 183

René Guénon,  »La grande triade » (extraits)

Chapitre XXI. Providence, Volonté, Destin

Au ternaire Deus, Homo, Natura, correspond rigoureusement celui formé par Providence, Volonté, Destin.

Fabre d’Olivet, Histoire philosophique du Genre humain (publié d’abord sous le titre De l’Etat social de l’Homme).

Fabre d’Olivet:__ »Que l’Homme universel soit une puissance, c’est ce qui est constaté par tous les codes sacrés des nations, c’est ce qui est senti par tous les sages, c’est ce qui est même avoué par les vrais savants… Les deux autres puissances, au milieu desquelles il se trouve placé, sont le Destin et la Providence. Au-dessous de lui est le Destin, nature nécessitée et naturée; au-dessus de lui est la Providence, nature libre et naturante. Il est, lui, comme règne hominal, la Volonté médiatrice, efficiente, placée entre ces deux natures pour leur servir de lien, de moyen de communication, et réunir deux actions, deux mouvements qui seraient incompatibles sans lui. »__

Providence ‘ Natura naturans / Ciel / yang

Destin ‘ Natura naturata / Terre / yin

Fabre d’Olivet: __ »Ces trois puissances, la Providence, l’Homme considéré comme règne hominal, et le Destin, constituent le ternaire universel. Rien n’échappe à leur action, tout leur est soumis dans l’Univers, tout, excepté Dieu lui-même qui, les enveloppant de son insondable unité, forme avec elles cette tétrade des anciens, cet immense quaternaire, qui est tout dans tous, et hors duquel il n’est rien. »__

La Volonté humaine est l’élément intérieur et central qui unifie et enveloppe les trois sphères intellectuelle, animique et instinctive (esprit, âme et corps).

La Volonté chez F. d’Olivet est l’image du Principe même dans l’homme. La Volonte doit être rapprochée de Soufre (sinon on risque de faire une malheureuse confusion avec une catégorie psychologique).

La Volonté humaine, en s’unissant à la Providence et en collaborant consciemment avec elle, peut faire équilibre au Destin et arriver à le neutraliser (Sapiens dominabitur astris).

L’homme choisit entre la Providence (unité, tendance ascendante ‘ sattwa) et Destin (multiplicité, tendance descendante ‘ tamas).

La relation pythagoricienne: 32 + 42 = 52 La Providence est représentée par 3, la Volonté humaine par 4, le Destin par 5. 3 est nombre céléste, 5 ‘ nombre terrestre.

René Guénon, La grande triade (extraits)