Le lendemain, réveil vers 6h. Je me suis rendu à la cuisine où se trouvaient déjà la Doña et Graciela.
-Bonjour !
-Bonjour, tu veux un café et des tortillas avec des oeufs ?
-Bien
Pendant que je prenais mon petit-déjeuner, la Doña vint me proposer de l’accompagner dans un camp de réfugiés du Guatemala dont elle s’occupait, j’acceptais.
L’homme blanc arriva à son tour en me demandant :
– Tu vas accompagner La Doña aux camps de réfugiés?
-Oui
-Fais attention à toi.
-Pourquoi ?
-Tu ne sais rien d’ici.
-ça fait longtemps que tu es là ?
-Je viens depuis pas mal d’années, je connais bien la Doña.
Nous avons marchés plus de trois heures dans la forêt avant d’arriver au camp de réfugiés.
C’était un oasis de misère dans une forêt tropicale. Quelques plaques ondulées en fer accrochées avec des cordes pour faire des toits ; des sacs poubelle déchirés pour faire des murs. La Doña endimanchée traversait le camp au bras du chef de village, un instituteur.
Les enfants se pressaient autour de nous, ils étaient sales,le ventre gonflé de parasites, habillés de guenilles, leurs yeux m’observaient en suppliant.
Le chef du village était le seul à parler le Mexicain, il m’expliqua leur exode depuis le Guatemala.
Les blancs avaient saisis leur terre, puis ils envoyèrent l’armée pour faire la sale besogne, déposséder les Indiens de leurs biens et menacer leurs vies.
Les vieux, les malades, étaient mort en chemin ; ils avaient mis des semaines pour traverser la forêt et chercher asile au Mexique, poursuivis par les militaires.
J’avais 23 ans, je me sentais parfaitement inutile, voyeur, à cet endroit. J’ai donné tout ce que je pouvais tee-shirt, cigarettes, etc.
Au retour, je n’ai pas dit un mot jusqu’à notre arrivée au ranch.
Après le repas, nous sommes restés pour discuter dans la cuisine autour du feu.
Le blanc que Chela (diminutif de Graciela) appelait El Monsieur était avec nous.
J’ai promis à la Doña de revenir, de collecter de l’argent, des médicaments, des vêtements, et de l’aider personnellement dans sa noble mission.
-tu es pris ! me dit El Monsieur d’un air méprisant.
-Ecoutes tes yeux, ouvres tes oreilles, qui es-tu ?
Je ne comprenais rien à son discours, perdu dans mes émotions.
Je ne songeais qu’aux regards suppliants croisés ce jour et à jamais dans mon coeur.