François

La papauté à l’heure d’une ère nouvelle

En élisant, mercredi 13 mars, le cardinal argentin Jorge Mario Bergoglio, les cardinaux ont signifié leur volonté d’ouvrir l’Église à de nouvelles dimensions.

 

Le choix du conclave prend acte des nouveaux équilibres géographiques du catholicisme, et pourrait marquer le début d’une nouvelle conception de la papauté.

En 1978, la papauté était sortie de l’Italie avec l’élection de Karol Wojtyla. Mercredi 13 mars, elle a pris les couleurs du monde avec celle du cardinal Bergoglio. « Le centre de gravité de l’Église a changé », notait, avant le conclave, le cardinal Walter Kasper, ancien président du Conseil pour l’unité des chrétiens. Ce centre n’est plus en Italie. Il n’est même plus en Europe. Désormais, 40 % des catholiques vivent dans cette Amérique latine dont le pape François est originaire. L’Église catholique est majoritairement une Église du Sud.

Il y a trente-cinq ans, avec un pape venu de l’autre côté du rideau de fer, en pleine guerre froide, l’Église s’inscrivait dans l’Histoire. Mercredi soir, elle a donné au monde un autre pape qui, de par son origine géographique, peut se faire la voix d’un Sud malmené par une mondialisation financière et économique dont il est plus victime qu’acteur.

Elle rappelle aussi l’importance que revêtent aujourd’hui pour elle ces terres sud-américaines. En effet, ce « continent de l’Espérance », selon l’expression de Jean-Paul II, est aussi celui de « tous les dangers » pour l’Église : depuis le début des années 1980, elle y a perdu un quart de ses fidèles, et doit faire face à la concurrence des communautés évangéliques plus attractives, et à un mouvement rude de sécularisation.

Le rôle du cardinal Bergoglio, comme président de la Conférence épiscopale argentine, et au niveau de l’ensemble de l’Église d’Amérique latine, a joué dans sa désignation comme successeur de Pierre. En 2007, lors de la rencontre des Églises d’Amérique latine à l’assemblée d’Aparecida, il est à l’origine de la nécessité de passer d’une Église « régulatrice » de la foi à une Église « facilitatrice » de la foi, afin de la remettre dans une dynamique d’évangélisation.

« L’option préférentielle » pour les pauvres

En se tournant vers le Sud, l’Église rappelle aussi sa priorité pour la charité et « l’option préférentielle » pour les pauvres. Lors des congrégations générales qui ont précédé le conclave, les cardinaux ont évoqué le besoin d’un message fort face à la crise économique et financière actuelle, tout comme ils ont fait part de leur inquiétude devant l’accroissement des situations de pauvreté. Mais pour que ce message puisse aujourd’hui être entendu, il était aussi important que l’institution ecclésiale adopte un comportement cohérent.

La simplicité du nouveau pape, son style de vie modeste devraient aller dans ce sens. Les cardinaux, expliquait le P. Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège, ont souligné l’urgence d’une annonce positive de la miséricorde et de la charité : « Il faut que l’on puisse parler en langage accessible à tout le monde. » En proposant mercredi soir au peuple de Rome de réciter ensemble les deux prières les plus simples et les plus connues des catholiques, le pape François semble avoir entendu la demande…

« Guérir son Église »

C’est d’ailleurs à travers ce retour à la pauvreté évangélique qu’il devrait procéder pour la réforme de la Curie. Le pape argentin ne répondra pas en manager à la crise du gouvernement interne de l’Église. Mais plutôt en… pape, c’est-à-dire selon les critères de l’Évangile. « Il faut faire la différence entre l’amélioration des méthodes de gouvernement, et une transformation profonde de l’esprit dans lequel est mené ce gouvernement », souligne un cardinal. François d’Assise n’est pas seulement celui qui a fait le choix de la pauvreté. Il est aussi le saint qui, en songe, a vu Dieu lui demander de « guérir son Église » à l’époque où la papauté était en proie aux intrigues et scandales d’argent. Voilà qui conforte l’idée d’un « ticket » que le pape devra former avec son « premier ministre », le secrétaire d’État. C’est à ce dernier, qui pourrait être un Italien, qu’il reviendra, dans la ligne fixée par le pape, de « manager » et mettre de l’ordre dans les affaires internes de l’Église.

Après un homme de Curie comme Benoît XVI en 2005, le conclave de 2013 s’est donc porté sur un pasteur, avec une solide expérience de terrain, celle d’une grande métropole. Les cardinaux ont fait ainsi le choix d’une papauté qui respecte mieux les initiatives de terrain, les besoins de chaque pays, chaque culture. « Il faut faire droit à une certaine casuistique, confiait avant le conclave le cardinal Vingt-Trois, pour tenir compte des situations pastorales des personnes, dans des pays et contextes donnés. » « Benoît XVI avait mis l’accent sur la foi comme vérité, observe de son côté le prieur de Bose, Enzo Bianchi. Le nouveau pape devrait insister sur la foi comme une pratique. » De fait, lors du pré-conclave, l’idée d’un juste milieu entre une « orthodoxie » et une « orthopraxis » pour la mise en œuvre de l’Évangile est souvent revenue dans les discussions.

Les cardinaux du terrain ont fait entendre leur voix

Dans ce conclave, les cardinaux du terrain – par opposition à ceux de la Curie – ont donc fait entendre leur voix. Il a été ainsi question d’une meilleure collégialité, c’est-à-dire concertation et collaboration, entre l’évêque de Rome et les évêques locaux. Réunir régulièrement les présidents des conférences épiscopales, mieux organiser le dialogue lors des synodes : autant de demandes, souvent revenues dans la salle Paul-VI, qui auront pesé dans l’élection.

Là encore, les premiers gestes du pape François sont autant de signes : la référence à Ignace d’Antioche (affirmant que l’Église de Rome « préside à la charité »), l’accent mis sur son rôle d’évêque de Rome, le fait d’appeler Benoît XVI « évêque émérite », et non pape émérite, et les autres cardinaux ses « frères », ou bien la demande faite aux Romains de « cheminer ensemble », ce qui n’est qu’une autre manière de dire la synodalité.

Le pape est évêque de Rome, « primus inter pares », chargé au milieu d’eux d’assurer l’unité de l’Église, et non le super-patron de l’Église universelle. C’est toute la conception de la papauté qui est en train de se modifier profondément, en ce début de troisième millénaire, conformément aux jalons posés par le concile Vatican II.

« La papauté ne sera plus jamais comme avant »

D’une certaine manière, en élisant François, les cardinaux ont relayé le geste prophétique de Benoît XVI de renoncer à sa charge pontificale, il y a un mois. « La papauté ne sera plus jamais comme avant », confiait le cardinal Roger Etchegaray, comparant la décision de Benoît XVI à l’encyclique de Jean-Paul II, Ut unum sint, où le pape polonais avait mis son autorité en jeu pour favoriser l’unité des Églises chrétiennes.

Réfléchissant aux dysfonctionnements de gouvernement qu’il rencontrait, Benoît XVI avait eu l’extrême humilité de reconnaître que ce pouvait être lui l’obstacle au changement, trop âgé et fatigué, devenu une « pierre sur laquelle on trébuche » comme il l’avait dit dans son homélie du 29 juin 2012, en jouant sur les deux sens du mot Pierre.

Désormais, le service du pape est plus grand que la personne qu’il incarne. Avec François, on voit que cette évolution ouvre de nouvelles perspectives en matière de gouvernance et de relations avec les autres confessions chrétiennes. Mercredi soir, l’Église catholique a pris le chemin du large.

Isabelle de Gaulmyn

Source: La croix

Amitiés: Claude Sarfati

Léopold Sédar Senghor parle du Père Teilhard de Chardin

                                                                                                                      Il nous a sortis de l’impasse

 

Dans la conjoncture historique que nous vivons, au milieu de nos contradictions, de nos angoisses, mais aussi de nos espoirs, nous ne pouvons élaborer l’avenir de l’homme sans nous référer à la pensée de Pierre Teilhard de Chardin.

Devant les échecs du capitalisme libéral et l’égoïsme des nations privilégiées, notre grande tentation a été de nous tourner vers le marxisme. Nous n’avons pas tardé à nous apercevoir que le marxisme, s’il pouvait nous aider à sortir de notre sous-développement, ne pouvait combler notre faim de nourritures spirituelles. Bien mieux, nous avons été amenés à nous interroger sur la valeur même du matérialisme dialectique. C’est Teilhard qui nous a permis de transcender l’antinomie du matérialisme et du spiritualisme.

Il nous offre, en effet, une base plus matérielle encore que celle du marxisme. Il fait mieux; il nous fait apercevoir, au plus profond de la matière, permettant ainsi l’épanouissement de l’esprit.

C’est ainsi que Pierre Teilhard de Chardin nous a sortis de l’impasse en conciliant la nécessité de vivre dans notre temps et celle de demeurer fidèles aux exigences spirituelles de la civilisation négro-africaine.

Au moment où nous essayons de résoudre les contradictions mêlées du passé et du présent, le Père Teilhard nous aide, plus qu’aucun autre, à bâtir un monde nouveau, en nous révélant les valeurs de complémentarités.

Léopold Sédar Senghor

Revue Planète

Ecoute les étoiles

Je vous souhaite un  joyeux noël au cœur de votre famille ou de votre clan (hexagramme 37).

Passez de merveilleux moments de partage, de chaleur humaine.

Je suis absent jusqu’au 01 Janvier 2012 Inclus, vous pouvez toutefois me laisser vos messages par email ou sur mon portable: 06.59.45.03.09.

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Dans son manteau rouge et blanc
Sur un traîneau porté par le vent
Il descendra par la cheminée
Petit garçon, il est l’heure d’aller se coucher

Tes yeux se voilent
Ecoute les étoiles
Tout est calme, reposé
Entends-tu les clochettes tintinnabuler ?

Et demain matin petit garçon
Tu trouveras dans tes chaussons
Tous les jouets dont tu as rêvé
Petit garçon il est l’heure d’aller se coucher

Tes yeux se voilent
Ecoute les étoiles
Tout est calme, reposé
Entends-tu les clochettes tintinnabuler ?

Et demain matin petit garçon
Tu trouveras dans tes chaussons
Tous les jouets dont tu as rêvé
Petit garçon il est l’heure d’aller se coucher… ….

graeme allwright

Petit garçon

Paroles : Henri DES.

Adaptation Graeme Allright

Musique : Roger Miller

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Fraternellement: Claude Sarfati

La béatification du Pape Jean Paul II

 

Dimanche premier mai, aura lieu la béatification de Jean Paul II à Rome.

Qu’est-ce une béatification? Comment cela se passe?

Karol Józef Wojtyła, devenu le pape Jean Paul II, va être béatifié dimanche prochain, six ans après sa mort. Près de 300.000 personnes sont attendues à Rome pour cet événement.

Qu’est-ce qu’une béatification?

La béatification est un «acte solennel par lequel le pape, usant de sa propre autorité, proclame bienheureuse une personne décédée», selon le dictionnaire Le Trésor de la langue française. Pour être proclamé bienheureux, le chrétien ou la chrétienne aura exercé sa foi de manière exemplaire ou héroïque durant sa vie. La validation d’un miracle est aussi nécessaire: Dans le cas de Jean Paul II, le miracle concerne une religieuse française. La sœur Marie Simon-Pierre, qui était atteinte de la maladie de Parkinson, a guéri soudainement.

Est-ce que Jean Paul II  va devenir un saint?

La béatification est différente de la canonisation, un rituel par lequel le bienheureux devient un saint. Pour que Jean Paul II devienne saint, il faudrait qu’un second miracle lui soit attribué.

Pourquoi une béatification six ans après sa mort?

Fait exceptionnel, Jean Paul II devient bienheureux six ans et un mois seulement après sa mort, survenue le 2 avril 2005. Ce jour-là, ses fidèles réclament sa sanctification immédiate, en criant notamment «Santo subito». Le pape actuel, Benoît XVI, n’a pas attendu cinq ans pour commencer l’examen du cas de Jean Paul II, ce qui est la règle. Pour quelles raisons? Jean Paul II a été un pape exceptionnel, tant par la longévité de son pontificat, 27 ans, que pour ses nombreuses actions politiques.

Comment se déroulent les manifestations?

Les manifestations se passent sur plusieurs jours, de vendredi à dimanche .  Vendredi, la tombe de Jean Paul II va être ouverte et son cercueil porté au centre de la basilique Saint-Pierre.

Samedi soir, une veillée se tiendra dans le centre de Rome, avec la tenue d’une célébration et des prières. A la fin de la veillée, les fidèles pourront faire, s’ils le souhaitent, une «Nuit blanche de la prière».

Un parcours balisé, menant à différentes églises de Rome, les conduiront progressivement vers la basilique Saint-Pierre. Les églises proposeront des accueils, et les transports en communs fonctionneront presque toute la nuit de samedi à dimanche.

Dimanche matin, devant tous les fidèles, une invocation se tiendra à 9h, avant une messe, qui débutera à 10h. A la fin de la célébration, Benoît XVI, le pape actuel, se recueillera devant le cercueil de Jean Paul II. Les fidèles pourront ensuite défiler silencieusement devant la dépouille du nouveau bienheureux.

Une relique de Jean Paul II, constituée d’une ampoule de son sang, va être également exposée dans un reliquaire.

Combien ça coûte ?

Lors d’une récente conférence de presse conjointe avec le cardinal Agostino Vallini, vicaire de Rome, le maire de Rome, Gianni Alemanno a évalué à 3,5 millions d’euros le coût des trois jours -le 30 avril, les 1er et 2 mai- qui verront se dérouler à la fois la béatification et la Fête annuelle du travail, avec les traditionnels concerts organisés par les syndicats.

Concernant l’affluence prévue pour cette béatification, 300.000 pèlerins et visiteurs sont annoncés par l’Œuvre romaine des pèlerinages, l’institution organisatrice de l’événement pour le Vatican.

Que vont faire les autorités françaises?

Le président de la République n’assistera à la cérémonie de béatification, contrairement à ce qu’il avait un temps envisagé. C’est le Premier ministre François Fillon qui représentera la France à cette béatification, car «la France est la fille aînée de l’église», a récemment déclaré le porte-parole du gouvernement François Baroin.

Une position qui a fait bondir l’opposition. Le PS a jugé récemment cette décision de la France «particulièrement choquante», car «la France n’est pas la fille aînée de l’Eglise, c’est «une République laïque».

Hormis le président italien Giorgio Napolitano et le président polonais Bronislaw Komorowski, aucun autre chef d’Etat étranger ne devrait être présent à Rome pour la cérémonie.

Vous pouvez suivre toutes les manifestations liées à cet évenement sur: Ktotv

Amitiés: Claude Sarfati

Laissez passer l’homme libre

des hommes et des dieux 2

Parti favori de cette 36ème cérémonie des Césars, Des Hommes et des Dieux, de Xavier Beauvois, a empoché vendredi 25 février le prix du meilleur film. Nommée dans onze catégories, l’histoire des moines de Tibéhirine, enlevés et assassinés en Algérie en 1996, est repartie avec trois récompenses.

Pour Beauvois, 43 ans, ce film délivre « la parole d’intelligence«  des moines: « Une parole qui dit qu’il ne faut pas avoir peur des autres, il faut juste se parler. C’est un message d’égalité, de liberté, de fraternité ». L’occasion, pour le réalisateur d’une mise au point : « Je n’ai pas envie que dans la campagne électorale qui arrive, on dise du mal des Français musulmans. J’ai envie qu’on soit avec eux, c’est la leçon de ce film », a-t-il insisté.

Michael Lonsdale, interprète de Frère Luc dans le film, a enfin été récompensé, pour la première fois à près de 80 ans, par le César du meilleur second rôle : « Ah petit coquin, tu en as mis du temps ! » a-t-il souri, avant d’ajouter aussitôt : « Mieux vaut tard que jamais.

Prix du jury très mérité au dernier Festival de Cannes, Des hommes et des dieux retrace le parcours des moines de Tibéhirine pendant les mois qui ont précédé leur assassinat en 1996, depuis le moment où ils sont devenus la cible des extrémistes du GIA jusqu’à celui où ils ont été enlevés, avant de disparaître dans des circonstances qui restent aujourd’hui encore à élucider. Leur cheminement spirituel est le sujet de ce long-métrage, le cinquième de Xavier Beauvois, à qui l’on doit Nord, un premier film d’une âpreté poignante, puis d’autres comme N’oublie pas que tu vas mourir ou Le Petit Lieutenant.

D’abord plongés dans le chaos par la peur qu’a engendrée chez chacun la perspective de sa propre mort, et qui a d’abord fait chanceler la cohésion du groupe, ces sept hommes ont finalement pris collectivement la décision de ne pas plier devant la violence. Refusant de piétiner l’idéal de fraternité auquel ils ont voué leur vie, ils ont choisi de rester dans le monastère plutôt que de rentrer en France comme on les poussait à le faire, certains en ayant d’ailleurs eu la tentation. Ils n’ont pas davantage accepté la protection que leur proposait l’armée.

Les dieux étant nombreux, ce qui intéresse le cinéaste dans cette tragédie relève moins du martyre des moines, que de la conscience – éthique, politique – des hommes qu’ils sont, et des questions existentielles que pose leur confrontation avec cette force armée qui piétine tout ce en quoi ils croient. Comment éprouver la liberté ? Qu’est-ce qu’une communauté ? Peut-on être soi en niant l’existence d’autrui ?

On peut, on doit, même, envisager ce film comme une profession de foi. Mais c’est dans le cinéma que Beauvois a toujours placé la sienne, et qu’il la place ici plus que jamais. Confiant dans le talent de sa chef opératrice, Caroline Champetier, dans celui de ses acteurs dont il a visiblement obtenu une adhésion totale, il signe une mise en scène puissante et dépouillée, délibérément lyrique, en s’inspirant du mode de vie hyperritualisé de l’ordre cistercien-trappiste auquel appartenaient les moines de Tibéhirine.

des hommes et des dieux

Maestria soufflante

La prière, les chants à l’unisson, les réunions au cours desquelles se prennent, à l’issue d’un tour de parole et d’un vote, les décisions engageant la vie de la communauté, et qui témoignent ici de la réduction progressive des antagonismes vers une communion spirituelle, structurent le film. Mais la place est faite, aussi, aux moments partagés avec les villageois (travail de la terre, dispense de soins, fêtes familiales…), dans le respect de l’islam.

Ou encore à des tête-à-tête, comme celui dans lequel Frère Luc, le médecin (Michael Lonsdale, à son meilleur), explique à Frère Christian, le chef de la communauté (Lambert Wilson, qui révèle dans ce film un charisme totalement inédit), qu’il ne craint nullement la mort. Au moment de quitter la pièce, la voix étouffée dans un petit sourire malicieux, il a cette phrase merveilleuse qui est aussi bien le programme du film : « Laissez passer l’homme libre… »

Les plans parlent d’eux-mêmes, chaque détail enrichissant le récit sans qu’il soit besoin de commentaire. Le partage d’un plateau de frites, la lecture à haute voix d’une chronique de L’Equipe, ou celle, pour soi, des Lettres persanes, suffisent à poser une atmosphère, une idée, une personnalité. Cette même économie narrative permet de donner leur place à sept personnages principaux – ce n’est pas rien -, sans parler des autres, les villageois, ou les terroristes du GIA dont l’irruption rompt brutalement l’harmonie ambiante.

Après avoir ordonné à tous les étrangers de quitter le pays, après avoir égorgé, aux abords du village, un groupe de Croates, ils frappent à la porte du monastère une nuit de Noël, exigeant de Frère Christian qu’il mette son médecin à leur disposition. Le refus que celui-ci leur oppose, et qu’il redouble en n’acceptant pas non plus de leur donner les médicaments destinés aux villageois, signe, il le sait, son arrêt de mort et celui de ses frères, à court ou à moyen terme.

S’en remettant à la majesté aride des paysages de l’Atlas (marocain pour le tournage), à l’épure laiteuse des robes des moines, à la rythmique du rituel, Xavier Beauvois joue avec les travellings avec une maestria soufflante, fait le grand écart entre Sergio Leone, Coppola et Pasolini, conduisant son film vers un final extravagant, à multiples détentes.

Deux scènes en particulier, qui figurent l’aboutissement de la communion spirituelle des moines en icône de la résistance, témoignent d’une audace peu commune dans le cinéma français d’aujourd’hui. La puissance qui s’en dégage conduit à se demander si, à l’heure des échanges mondialisés, il n’y a pas un effet libérateur à raconter des histoires qui s’affranchissent des frontières hexagonales.


 

Des hommes et des dieux, film français de Xavier Beauvois avec Lambert Wilson, Michael Lonsdale, Olivier Rabourdin.

Source : Le Monde, Isabelle Regnier

Bonne lecture, bon film, bon dimanche: Claude Sarfati.