Montségur

Montségur

 

Le 16 mars 1244, au pied de la forteresse de Montségur, plus de 200 hérétiques qui ont refusé de renier la foi cathare montent volontairement sur le bûcher. Leur martyre marque la fin de la croisade contre les Albigeois.

Résistance

Après vingt ans de violents combats, la croisade contre l’hérésie cathare avait abouti en 1229 à la soumission du comte de Toulouse. Mais les exactions des croisés venus du Nord suscitent la rébellion de nombreux chevaliers du Midi, les faidits. Ces seigneurs dépossédés par les croisés entrent en résistance au côté des hérétiques cathares. Bonshommes et faidits trouvent refuge auprès de forteresses comme Montségur, dont le seigneur est acquis à leur cause.

Fatal débordement

À 1207 mètres d’altitude, sur un piton rocheux au milieu des forêts de l’actuel département de l’Ariège, la forteresse de Montségur a été renforcée dès 1204 par le seigneur du lieu, Raymond de Péreille, à la demande de la communauté cathare.

À l’intérieur de l’enceinte vivent une centaine d’hommes d’armes (des faidits), leurs familles, ainsi que le seigneur du lieu, Raymond de Pareille. À l’extérieur, au pied des murailles, s’est constitué un véritable village cathare de 600 habitants avec son évêque, ses diacres et ses fidèles.

Le roi de France, qui n’est autre que Louis IX (plus tard Saint Louis), n’a aucune envie d’user son armée dans la conquête de Montségur aussi longtemps que celle-ci ne lui cause aucun tort. Chacun s’accommode donc du statu quo… jusqu’à un jour de mai 1242 où les chevaliers de Montségur apprennent que tous les inquisiteurs de la région ont fait halte dans un village voisin pour y passer la nuit.

Ces chevaliers ont tous des comptes à régler avec l’Inquisition et, à la différence des cathares, ne se dispensent pas de tuer quand l’envie leur en vient. Le 29 mai 1242, une trentaine d’entre eux, sous le commandement d’un seigneur dont la femme et la fille ont été torturées et brûlées par l’Inquisition, se ruent sur le village d’Avignonet, près de Castelnaudary. Dans la nuit, ils massacrent les onze inquisiteurs dont leur chef, le tristement célèbre Guillaume Arnaud.

Le pape exige aussitôt qu’il soit mis fin à l’impunité de Montségur, qualifiée de «synagogue de Satan». S’ouvre le dernier acte de la croisade des Albigeois.

Un siège de dix mois

Le roi de France envoie à Montségur une armée de 4.000 hommes sous le commandement du sénéchal Hugues des Arcis. Mais la citadelle, sur son piton calcaire, est remarquablement défendue et n’est accessible que par un étroit sentier (celui qu’empruntent aujourd’hui les touristes).

Elle ne peut non plus être atteinte par les pierres propulsées du bas de la colline par les catapultes.

Après plusieurs mois d’un vain siège, le sénéchal choisit d’attaquer la citadelle à l’endroit le plus difficile d’accès… et donc le moins défendu. Pour parfaire la surprise, il n’hésite pas à s’y prendre pendant l’hiver 1243 (la nuit même de Noël, assurent les croisés !).

Une quinzaine de Gascons, sans doute conseillés par un habitant de la région, escaladent la falaise à l’endroit dit «Roc de la Tour». Ils amènent bien évidemment avec eux leurs armes. Pour juger de l’exploit, il faut savoir que cette falaise est aujourd’hui classée hors-catégorie par les spécialistes de l’escalade !

Les grimpeurs arrivent à une barbacane, un petit poste de défense avancé situé sur la crête à 1500 mètres du château proprement dit. Après avoir égorgé les sentinelles, ils font monter des menuisiers et sans attendre assemblent des machines de jet. La citadelle et ses dépendances ne tardent pas à être bombardées de pierres. Les combats au corps à corps se multiplient par ailleurs aux abords des murailles.

Les effectifs des défenseurs fondent si bien que le 1er mars, après une ultime tentative de sortie, le seigneur du château, en accord avec les chefs cathares, décide d’entamer les négociations. Hugues des Arcis, homme du roi, homme d’honneur (rien à voir avec un Simon de Montfort), accorde aux vaincus des conditions généreuses. Elles tiennent en quatre points:

– liberté pour tous les défenseurs catholiques,
– vie sauve pour les hérétiques qui se convertiront sincèrement,
– pas de pillage,
– délai de deux semaines avant la mise en oeuvre des précédentes conditions.

Le délai accordé aux assiégés va exciter plus tard la curiosité des chercheurs de trésor : les cathares en auraient-ils profité pour mettre à l’abri un hypothétique «trésor» ? L’hypothèse s’appuie sur une chronique de l’époque faisant allusion à quatre cathares s’étant enfuis avec un sac. On peut cependant penser que le sac contenait tout simplement des provisions pour une longue période de clandestinité…

Comme prévu, la citadelle se livre le 16 mars 1244 après un siège exceptionnellement long de dix mois. Plus de deux cents cathares, hommes et femmes, refusent de renier leur foi (leur nombre exact demeure inconnu). Ils sont menés vers un bûcher géant aménagé au pied de la forteresse, en un lieu aujourd’hui connu sous le nom de «Prats dels Crémats» (Champ des Brûlés). Selon d’autres hypothèses, ils auraient été suppliciés à 60 kilomètres de là, dans le village de Bram

Épilogue

Avec la chute de Montségur, il ne subsiste pratiquement plus rien de l’hérésie qui avait pendant quelques décennies menacé l’unité de la Chrétienté occidentale. Un demi-siècle plus tard, les inquisiteurs auront raison de ses derniers fidèles dans quelques villages reculés des Pyrénées comme Montaillou, devenu célèbre avec le livre que lui a consacré en 1975 l’historien Emmanuel Leroy-Ladurie.

La France de langue d’oc se rallie sans réticence à la monarchie capétienne. Le temps de la réconciliation arrive et les seigneurs méridionaux suivent avec dévouement le roi Louis IX dans ses folles croisades à Damiette, en Égypte, puis à Tunis.

Jean-François Zilberman

 

Bonne lecture, bonne écoute, bon dimanche: Claude Sarfati

La société Cathare

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La société Cathare était relativement hiérarchisée: il y avait des « Bons Hommes et Bonnes Femmes », ou encore « Bons Chrétiens », des Diacres, et des évêques.

Les Bons Hommes sillonnaient la région en allant par deux. Ils étaient vêtus de robes de bures et de sandales, vivaient de mendicité, et prêchaient la doctrine Cathare. Ils ne mangeaient pas d’aliment « issus du Coït animal », refusaient le mariage, et étaient appelés « Bons Hommes » parce qu’ils menaient, pour les Cathares, une vie exemplaire. Ils avaient reçu, et pouvaient donner le « Consolament», une sorte de bénédiction/baptême, qui les rendait purs selon le rite Cathare. En général, ils donnaient le Consolamentum à un mourant, afin que l’Esprit qu’il renfermait puisse retrouver son origine divine, une fois que le corps aurait périt (l’âme, elle, s’échappait pour entrer dans un autre corps). Enfin, il n’y avait pas de ségrégation sexuelle puisque les femmes pouvaient très bien être des Bonnes Femmes (l’une des plus célèbres fut Esclarmonde de Foix, sœur du comte de Foix).

Hors de leur vie de prêche, ils vivaient en communauté, et observaient un jeûne strict au Pain et à l’eau tous les deux jours, ainsi que trois jeûnes annuels. Ils ne consommaient pas d’oeuf, de lait, de fromage, ou de viande, mais ils mangeaient du poisson, nourriture Divine par essence. Ils travaillaient pour gagner leur vié, étaient ouvriers dans les champs, herboristes/soigneurs, etc.

(NOTA: le poisson était le signe de ralliement des premiers Chrétiens, le Soleil se levant dans la Constellation des poissons, et Jésus ayant multiplié le pain et les poissons pour nourrir ses fidèles)

Les Diacres étaient les « supérieurs » des Parfaits, de même que les évêques étaient supérieurs aux Diacres, mais il n’existait pas à proprement parler de Diocèse. Nombre de Diacres furent tués lors de la prise de Monstégur.

Outre les Religieux Cathares, il y avait les croyants, villageois, seigneurs, qui vivaient et se reproduisaient comme leurs voisins Catholiques Romains, et recevaient le Consolament à leur mort, ou de leur vivant s’ils voulaient entrer en vie religieuse.

Source: Anne Brenon: Les Cathares

Bonne lecture, bonne écoute, bon dimanche: Claude Sarfati.

La foi des Cathares

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Le Catharisme trouve ses racines dans le Christianisme archaïque des débuts, et possède un certain parallélisme avec la religion Perse Bogomile, bien que celle-ci en diffère par bien des aspects.

Les hérésies Chrétiennes du XIe siècle se recoupent toutes plus ou moins, mais le Catharisme tranche par sa complexité, et surtout, son organisation « hiérarchique » par rapport aux autres hérésies. Il s’est répandu à travers toute l’Europe en passant par la Turquie, et la botte Italienne. Il ne perdura cependant que dans le Sud de la France, et dans quelques îlots isolés en Europe, endroits où l’intransigeance de Rome se faisait peu ressentir.

Les Cathares se réclamaient de la Chrétienté, et s’appuyaient sur le Nouveau Testament, donnant une position capitale aux Evangiles (l’Ancien testament était considéré comme l’histoire d’un Dieu différent du leur).
Les Cathares ont une vision dualiste du monde: Dieu est par essence bon, il ne peut donc être responsable des malheurs du monde. Le mal est son principe contraire absolu, ce qui mène à la conclusion suivante: il existe deux créations, celle issue du bien, et celle issue du mal (tout cela reposant sur une différence d’interprétation d’un verset de l’Evangile de St Jean). Ainsi, tout ce qui est matériel est mauvais et œuvre de Satan (le premier des anges Déchus), et tout ce qui est spirituel, est bon et œuvre de Dieu.

L’Homme est un être fait de matière, il ne peut donc pas être une créature Divine. Pour le créer, Satan séduisit des anges de Dieu et les emprisonna dans des corps de chair. L’âme, contenue dans le sang, leur conféra la vie même (si un homme perd son sang, il meurt). Ainsi un homme comprend trois entités distinctes: le Corps (mauvais), l’Esprit (bon et immortel), et l’Âme (source de vie). L’Esprit est immortel, mais ne sera libéré que par le consolament, l’obligeant à se réincarner sans fin tant que celui-ci n’est pas acquis. Cette réincarnation n’a rien à voir avec celle des Hindous (qui pensent qu’une vie exemplaire permet de se réincarner en un être humain plus noble et plus pur).

Procédant de ce principe, le Christ, considéré par Rome comme Dieu incarné en un être de chair, ne peut être Dieu sous cette forme.
Le Christ est un esprit envoyé par Dieu (et considéré comme son fils), venu pour rappeler aux hommes leur essence divine, et non le Rédempteur présenté par l’Eglise Catholique, conçu par Dieu et né de la Vierge Marie.

Bonne lecture, bonne écoute, bon dimanche: Claude Sarfati.

Les Cathares (Origines)

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NE QUID FALSI AUDEAT.
NE QUID VERI NON AUDEAT.

« Qu’il n’ose pas dire quelque chose de faux et
qu’il ne soit pas sans oser dire quelque chose de vrai
. »

( Devise de l’historien).

En hommage à monsieur Odile François, érudit méconnu de la Champagne.
Un grand merci à monsieur Gilbert Chérest, autre érudit méconnu qui m’a fait redécouvrir le patrimoine historique champenois.

INTRODUCTION.

Toute science naît de l’observation mais si l’homme vient à considérer sa propre nature il y trouve une multitude d’énigmes, à commencer par celles qui limitent le cours de sa vie, la naissance et la mort.
D’autres observations viennent se greffer sur l’arbre de la vie qui conduisent souvent l’homme en quête de lui-même sur les chemins de l’égarement, de l’épouvante ou du merveilleux. De tous temps il en a été ainsi.
L’échappatoire, pour l’homme, existe en la croyance en une intervention supra naturelle qui, au fil des siècles, prendra un caractère divin anthropomorphique. Ainsi vont naître la théurgie mais aussi l’idolâtrie, les vraies ou les fausses croyances déistes, la magie naturelle, etc. autant de sources légendaires qu’il existera de civilisations et qui tenteront toutes de replacer l‘homme dans ce qu‘il considère comme son univers.

De l’Antiquité aux temps modernes vont ainsi s’affronter les partisans de ces différentes formes de cultures religieuses qui ont toujours permis de considérer l’homme dans son environnement cultuel et de situer sa place dans le monde, une lutte parfois fratricide qui verra enfin triompher le christianisme aux abords du Moyen Age. Ceux qui, alors, ne reconnaîtront pas le « credo » du christianisme triomphant seront déclarés devins, sorciers et enfin hérétiques.

Les pages suivantes racontent cette histoire qui pourrait commencer en 314 au concile d’Ancyre (aujourd’hui Ankara) lorsque l’Eglise chrétienne dénonça « ces méprisables femmes qui se vantent de chevaucher certaines nuits, sur des bêtes extraordinaires, et d’être transportées de la sorte à travers l’espace à des danses et à des divertissements auxquels président Hérodiade ou Diane, la déesse des païens ».

L’histoire du christianisme primitif provient essentiellement de ce que nous ont laissé les apôtres et autres disciples du Christ. L’harmonisation des textes qui se fit aux quatrième et au cinquième siècles a donné au christianisme primitif son corpus cohérent. Mais la nature même des sources nous empêche de faire la distinction entre les enseignements originels et ceux développés par la suite par les Pères de l’Eglise.

C’est au cours du second siècle que le christianisme commença à s’écarter des enseignements puisés aux racines juives tout simplement parce que les chrétiens non juifs étaient devenus plus nombreux que les juifs convertis au christianisme.

Le novateur, en quelque sorte, de la nouvelle doctrine religieuse fut saint Paul qui se définissait lui-même comme « l’instrument de Dieu ». Saint Paul fut le premier vrai théologien chrétien.

Au quatrième siècle le christianisme s’était si bien développé et consolidé qu’il ne restait aux dirigeant de l’Empire romain que deux solutions, soit éradiquer cette secte soit l’accepter. Si Dioclétien fit tout pour l’abattre, Constantin la reconnut et, de facto, fonda l’empire chrétien. Dès lors il fut de bon ton d’être chrétien.

Si le christianisme occidental devint de plus en plus centralisé, le christianisme oriental se structura sous l’autorité de nombreux centres autonomes comme ceux de Constantinople, Jérusalem ou Alexandrie.

Cette entité unique occidentale, sous l’autorité du pape et des évêques, créa en son sein de nombreuses dissensions et controverses théologiques. L’Eglise renforça donc son organisation, centralisant plus encore l’autorité entre les mains des évêques ce qui permit finalement de se débarrasser des hérétiques, sans pour autant faire oublier au bon peuple les nombreux aspects de la vision de monde qu’avaient eu ces mouvements religieux ésotériques (gnosticisme par exemple).

On vit donc apparaître, dès le second siècle, des mouvements religieux chrétiens dont le principal celui des gnostiques allait perdurer jusqu’au Moyen Age et retrouver une nouvelle vigueur moderne cette fois ci à la lecture des documents découverts à Nag Hammadi.

Source: Les Cathares oubliés

De Daniel de castille

Editions Broché

 

Bonne lecture, bonne écoute, bon dimanche: Claude Sarfati.